Les inégalités de genre en Inde. Regard au prisme des études postcoloniales
Auteur(s) :MARIUS
Résumé :
À travers la situation des femmes actives en pays tamoul, Kamala Marius plaide pour une interprétation multiple des inégalités et des facteurs de domination. Sa recherche montre aussi que les mobilités spatiales et sociales des femmes favorisent une redéfinition des rapports de genre, de caste et de communauté.
Nul pays plus que l’Inde ne suscite autant de sentiments contradictoires. Ses paysages contrastés, ses religions, ses castes, ses hommes et ses femmes ont attisé les imaginations occidentales depuis des siècles. Aux antipodes de ce cliché orientaliste, les femmes indiennes sont représentées comme des victimes d’un système patriarcal archaïque opposé au nôtre. Cette vision a-historique, décontextualisée et universalisante des femmes indiennes a conforté les féministes libérales dans leur construction essentialiste des femmes comme victimes plutôt que comme agents de résistance et de changement.
À travers la situation des femmes actives en pays tamoul, Kamala Marius plaide pour une interprétation multiple des inégalités et des facteurs de domination : la précarité du statut des femmes prenant le pas sur d’autres facteurs comme la caste, la classe, les lieux. Sa recherche montre aussi que les mobilités spatiales et sociales des femmes favorisent une redéfinition des rapports de genre, de caste et de communauté. Elle souligne combien ce processus cumulatif des mobilités constitue une source d’empowerment et d’émancipation.
L’apport de cet ouvrage est de trois ordres : empirique d’abord, présentant un panorama complet et commenté d’une large palette des inégalités genrées en Inde ; théorique et conceptuel ensuite, couvrant un champ de recherche allant du féminisme postcolonial aux subaltern studies ; réflexif enfin, appuyé sur de solides investigations de terrain. Son sujet qui considère à la fois l’individu et le groupe au travers de leurs pratiques, de leurs discours et de leurs représentations invite à dépasser les clivages disciplinaires. Son terrain d’étude, l’Inde, est systématiquement mis en perspective avec son parcours et son itinéraire personnel posant ainsi les jalons d’une réflexion critique novatrice.
Kamala Marius, géographe, est maîtresse de conférences à l’Université de Bordeaux-Montaigne et chercheure à l’UMR LAM (Sciences Po Bordeaux). Elle est chercheure associée à l’Institut Français de Pondichéry (Inde) depuis une trentaine d’années. Auteure de nombreux articles et ouvrages sur l’Inde, elle poursuit actuellement des recherches sur les dynamiques urbaines indiennes.
Table des matières
Remerciements
Introduction
PREMIÈRE PARTIE : De l’inégalité de genre en Inde
INTRODUCTION À LA PREMIÈRE PARTIE
1. Castes, inégalités sociales et genre
« Un système hiérarchique de castes » ?
Caste et inégalités socio-spatiales
2. Inégalité de statut pour les femmes tout au long de la vie
Organisation familiale patriarcale et espace dichotomique masculin-féminin
Le mariage : une affaire familiale intra-caste
Le mariage : un biais de genre dans le système des migrations
La dot (dowry) : source d’inégalité de genre majeure
Une identité de genre construite par le mariage
Accès à l’emploi et évolution des rapports de genre
3. Inégalités de genre liées à la survie
Le corps des femmes régi par un système de normes collectives
Une géographie de la discrimination : proximité spatiale et diffusion des comportements
Opportunités inégales
Le modèle kéralais ?
4. Corps, genre et espace
Des pratiques spatiales sous contraintes
Inégalités des rapports de pouvoir et violence de genre
5. Inégalités d’accès à l’emploi et féminisation du travail informel
Inégalités d’accès à l’emploi
Une participation des femmes encore faible
6. Constitution égalitaire versus lois civiles personnelles inégalitaires. De l’impossibilité de concilier égalité de genre, de caste et de communauté
Le sécularisme ou la version indienne de la laïcité
Conflits entre droits religieux et obligations constitutionnelles
Une représentation politique des femmes limitée
Une instrumentalisation politique des femmes par la droite nationaliste hindoue
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE
DEUXIÈME PARTIE : Pour une approche féministe postcoloniale et intersectionnelle
INTRODUCTION À LA DEUXIÈME PARTIE
7. Le féminisme postcolonial ou la mise à l’épreuve du féminisme hégémonique et ethnocentrique
Les précurseures : les féministes of color
Les postcolonial studies : un champ de recherche inépuisable
Études postcoloniales du féminisme : une décolonisation du féminisme
Qui peut parler et pour qui ?
L’apport des subaltern studies
Quelle prise en compte de l’espace ?
Vers un féminisme transnational ou le féminisme à l’épreuve de la mondialisation
8. Des outils conceptuels critiques à des fins normatives
Le genre : concept opératoire pour l’analyse des processus socio-spatiaux
Un outil d’analyse critique
L’apport du champ de savoir « genre et développement »
L’outil genre permet de repenser le travail
L’outil genre permet de repenser l’espace
L’empowerment : un concept féministe récupéré et instrumentalisé par les institutions internationales
L’approche par les capabilités : une approche normative universelle
9. Les féminismes indiens : féminisme libéral international versus féminisme « indigène »
Un mouvement féminin longtemps dominé par des femmes de hautes castes hindoues
Féminisme international libéral : égalité et individualisme
Crise identitaire du féminisme indien et montée du féminisme indigène
CONCLUSION DE LA DEUXIÈME PARTIE
TROISIÈME PARTIE : Genre, travail et espaces en pays tamoul
INTRODUCTION À LA TROISIÈME PARTIE
10. Faire du genre en géographie : démarche réflexive sur ma méthodologie de recherche en pays tamoul
Enjeux et limites des indicateurs genrés
La méthode des capabilités
Limites des indicateurs d’inégalité de genre
Critique des indicateurs d’empowerment : l’exemple de la microfinance
Les méthodes d’évaluation participatives
Du « terrain » aux questionnaires
Le terrain : un espace-temps défini par le chercheur
Temporalités et espaces de vie du quotidien
11. Genre, travail et espace en pays tamoul au regard des méthodes intersectionnelles
Féminisation du travail informel et stratégies de survie
Rôle des politiques publiques dans la lutte contre la féminisation de la pauvreté
La microfinance : vecteur d’empowerment ou cheval de Troie de la mondialisation ?
Les Self help groups, outil d’empowerment ?
Le microcrédit, nouvelle forme de subsidiarité de l’action publique ?
La SEWA (Self Employed Women’s Association) : une organisation syndicale des travailleuses informelles
Émergence du travail salarié féminin en usine et nouvel espace de vie : le cas des petites villes industrielles de la vallée de la Palar
Un contexte particulier : le district industriel du cuir de la vallée de la Palar
De l’entretien au questionnaire
Informalisation du travail formel, précarisation de l’emploi féminin et féminisation des stratégies de survie
L’usine, vecteur de mobilités circulaires et d’un nouvel espace de vie
Nouvelle identité de genre et reconstruction des rapports de genre, de caste, de classe et de communauté
CONCLUSION DE LA TROISIÈME PARTIE
Conclusion générale
Bibliographie
Ils en ont parlé
"A travers la situation des femmes actives en pays tamoul, Kamala Marius plaide pour une interprétation multiple des inégalités et des facteurs de domination : la précarité du statut des femmes prenant le pas sur d'autres facteurs comme la caste, la classe, les lieux."
Une recension dans le magazine Yoga et Vie n°170 (juillet 2016)
"[...] Kamala Marius, maîtresse de conférence à l’Université de Bordeaux-Montaigne, confirme : «Il est beaucoup plus dur en milieu rural de dénoncer un viol. La culture du tabou est très forte, d’autant qu’elle recoupe des inégalités de castes. Les auteurs de viols sont souvent des hommes appartenant aux castes de propriétaires, qui exercent ce qui s’apparente à un droit de cuissage.»[...]"
Un article par Nelly Didelot dans Libération (mai 2018)
"[...] Les agressions sexuelles touchent toutes les classes sociales, comme en témoigne le sort de Jyoti Singh Pandey, étudiante de la classe moyenne. Il peut être également utilisé comme un moyen de répression des castes dominantes sur les castes inférieures. « En milieu rural, on observe un rapport de domination entre castes quasiment féodal », rapporte Kamala Marius, « les hommes des castes dominantes peuvent abuser des femmes, car ils considèrent qu’ils les possèdent, au même titre que leurs terres ».[...]"
Une recension par Anouch Bezelgues dans L'Orient le jour (mai 2018)
Fiche technique
- ISBN
- 9782811111823
- Date de parution
- 2016-07-20
- Nombre de pages
- 300
- Largeur
- 160 mm
- Hauteur
- 240 mm
- Editeur
- Karthala
Collection
Thématique(s)
Economie et développement, Histoire, Peuples et sociétés, Questions sociales
Zone(s) géographique(s)
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